Les dispositions relatives à l’obstruction revêtent une importance cruciale pour garantir l’effectivité des pouvoirs d’enquête et d’instruction de l’Autorité. L’entreprise faisant l’objet d’une mesure d’investigation est ainsi soumise à une obligation de collaboration active et loyale, qui implique notamment de sa part qu’elle réponde aux demandes d’informations communiquées par l’Autorité et qu’elle ne fasse pas obstacle au bon déroulement de l’enquête, par exemple en se rendant coupable de bris de scellés, en omettant de répondre ou en donnant des informations incorrectes ou incomplètes ou encore en intervenant sur les messageries électroniques durant des opérations de visites et de saisie. Dans le cas contraire, elle s’expose à des sanctions qui peuvent atteindre des montants significatifs.
En juillet 2021, l’Autorité a ainsi sanctionné à hauteur de 5 000 euros l’entreprise Nixon, active dans le secteur de l’horlogerie, pour s’être abstenue, sur une période de cinq mois, de répondre à la demande d’informations envoyée dans le cadre d’une assistance apportée à l’autorité grecque de la concurrence. Si la société, comme elle l’avait avancé, a connu des mesures de restructuration, cette situation ne saurait en aucun cas justifier, à elle seule, l’absence totale de réponse (Décision 21-D-16 du 9 juillet 2021).
Par ailleurs, en décembre 2021, l’Autorité a également sanctionné, à hauteur de 100 000 euros, Mayotte Channel Gateway (MCG), qui gère et exploite le port de Longoni à Mayotte –, et sa société mère (Société Nel Import Export) – pour un comportement similaire consistant à s’abstenir de répondre à des demandes d’informations émanant des services d’instruction. Ces derniers avaient adressé un questionnaire à MCG et malgré plusieurs relances, deux prorogations des délais de réponse et un double rappel des sanctions encourues en cas de non réponse, les entreprises n’avaient pas apporté la moindre réponse à l’Autorité, dix mois après l’envoi du questionnaire (Décision 21-D-28 du 9 décembre 2021).
Enfin, en mai 2021, l’Autorité a sanctionné le groupe Fleury Michon à hauteur de 100 000 euros pour avoir fait obstacle au déroulement de l’instruction dans l’affaire du cartel du secteur du jambon et de la charcuterie, laquelle l’avait conduite à infliger 93 millions d’euros d’amende en juillet 2020. Lors de l’instruction, il était apparu que le groupe n’avait pas informé les services d’instruction de la modification de sa structure sociale, alors même qu’une opération de restructuration interne avait entraîné la radiation de la société Fleury Michon Charcuterie. Le groupe Fleury Michon non seulement n’avait pas signalé cette opération aux services d’instruction, mais avait contribué activement à les induire en erreur après l’envoi de la notification de griefs, en déposant, par l’intermédiaire de ses avocats, des écritures au nom et pour le compte de la société Fleury Michon Charcuterie, alors que cette société n’existait plus. Pour finir, le groupe Fleury Michon avait par la suite tenté de tirer profit de ses propres manquements, en soutenant, dans le cadre de la procédure ayant donné lieu à l’adoption de la décision de sanction du cartel, que la société Fleury Michon LS devait être mise hors de cause, faute d’avoir été personnellement destinataire de la notification de griefs (Décision 21-D-10 du 3 mai 2021).