Les contours d’un cadre juridique clarifié se dessinent
En matière de développement durable, les entreprises prennent désormais part au changement. Si, de prime abord, la politique de concurrence n’apparaît pas en première ligne sur les questions de durabilité, droit de la concurrence et développement durable trouvent cependant un point de rencontre dans la mesure où, en protégeant le processus concurrentiel, le droit de la concurrence protège et promeut non seulement le bien-être du consommateur, qui s’exprime de plus en plus vers des produits durables, mais également les innovations durables. Plus directement encore, le droit de la concurrence encadre les initiatives envisagées par les acteurs économiques en matière de développement durable. Or ces initiatives peuvent, dans certains cas, potentiellement contredire le droit de la concurrence. L’examen de ces initiatives par les autorités de concurrence permet alors de sécuriser les coopérations favorables au développement durable qui génèrent des effets positifs en termes d’intérêt public compensant les effets négatifs sur la concurrence et qui bénéficient en particulier suffisamment aux consommateurs.
En France, l’Autorité a conscience de la difficulté pour les acteurs économiques de s’assurer, dans certains cas, que leurs accords ne posent pas de problèmes sur le terrain concurrentiel. C’est la raison pour laquelle les services d’instruction mènent une réflexion approfondie sur ces sujets au sein d’un réseau interne dédié (Réseau du développement durable) et l’Autorité participe aux multiples travaux engagés dans les enceintes internationales, que ce soit à l’ocde, au sein du réseau européen de concurrence ou encore du réseau international de concurrence dont l’un des thèmes majeurs de l’édition 2021 a été consacré à la durabilité (Pour voir ou revoir la conférence de l’icn, Sustainable Development and Competition Law, 13 octobre 2021, https://icn2021budapest.hu/site/).
Au niveau européen, le processus de révision des règles relatives aux accords de coopération horizontale entre entreprises est, par ailleurs, en cours. L’objectif est d’adapter les règles actuelles aux évolutions économiques et sociétales qui sont intervenues ces dix dernières années en matière de transitions numérique et écologique. Le projet de lignes directrices prévoit un chapitre nouveau consacré à l’évaluation des accords horizontaux poursuivant des objectifs de durabilité. Il sera ainsi clarifié auprès des entreprises dans quels cas elles peuvent licitement coopérer avec des concurrents, y compris, le cas échéant, en bénéficiant d’une exemption individuelle pour les situations les plus complexes. Le projet accorde, en particulier, « une attention particulière aux accords qui fixent des normes de durabilité, étant donné que cela devrait être la forme de coopération la plus fréquente pour réaliser les objectifs de durabilité » (Communiqué de presse CE, 1er mars 2022 et note explicative accompagnant les projets de REC horizontaux et de lignes directrices révisés).